Parmi les habitués des vols aériens, que ce soient ceux en déplacement pour leur entreprise ou ceux qui voyagent pour le plaisir, les voyageurs d’affaires deviennent une cible à part pour les compagnies aériennes et les compagnies ferroviaires qui développent des stratégies et des programmes de fidélisation spécifiques afin de respecter les politiques de voyage des entreprises et les règles fiscales. Selon Air France, ces passagers en déplacement pour des motifs professionnels représentent environ 10% de ses clients mais 40% de son chiffre d’affaires.
Fiscalité, régime social et Miles
La question est légitime : à qui profitent les Miles associés à des billets pris en charge par l’entreprise ?
Le voyageur d’affaires a la possibilité de cumuler les Miles lors de ses déplacements professionnels dans le cadre des programmes de fidélisation des compagnies aériennes. Ces Miles peuvent être utilisés à titre personnel et le sont la plupart du temps. Pourtant, les employeurs pourraient demander à ce que ces Miles cumulés soient uniquement utilisés à des fins professionnelles, dans la réservation de billets pour réaliser des déplacements professionnels.
La plupart des dirigeants d’entreprise perçoivent les Miles comme une contrepartie légitime des conditions de travail difficiles des voyageurs d’affaires pris entre le décalage horaire, le stress de l’organisation, les vols de nuit, la fréquence des déplacements au détriment d’une présence familiale et la fatigue due aux distances parcourues lors des vols long-courriers et court-courriers.
L’article L.3121-4 du Code du travail de 2005 vient conforter cela : « si les temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail ne constituent pas du temps de travail effectif, ils doivent cependant faire l’objet d’une contrepartie sous forme de repos ou sous forme financière s’ils dépassent le temps de trajet normal entre le domicile et le lieu de travail ». La Cour de cassation, elle, considère que le trajet excédant le temps habituel doit être compté comme du temps de travail effectif.
Contrairement à certains pays européens tels que l’Allemagne, l’Autriche ou encore les pays scandinaves où les Miles cumulés grâce aux dépenses professionnelles sont automatiquement versées à l’entreprise et que ceux utilisés à des fins personnelles sont déclarés comme un avantage en nature c’est-à-dire imposables, il n’existe à ce jour en France aucune disposition ni aucune jurisprudence qui aurait fixé le statut fiscal et social des Miles.
Au regard du droit de la Sécurité sociale, les Miles constituent bel et bien un avantage en nature. Ni l’Urssaf ni le fisc n’ont statué là-dessus et le rapport des Miles à la politique de dépenses et de voyages des entreprises reste avant tout un accord tacite entre le collaborateur et l’employeur.
Comme le résume Ravindra Bhagwanani, dirigeant de Global Flight, la question des Miles est une question d’intérêt pour les entreprises. « Soit on laisse les Miles aux voyageurs et ils en font ce qu’ils veulent, soit l’entreprise les collecte pour réduire son budget aérien (…) si on ne fait pas cela, les voyageurs accumulent les Miles, sont incités à en accumuler toujours plus et entraînent des coûts supplémentaires directs pour l’entreprise. » (citation extraite d’un article d’Edenred). En effet, les voyageurs d’affaires adhèrent le plus souvent aux programmes de fidélité des compagnies aériennes ce qui leur donne droit à des surclassements. On se rappelle du film In the Air dans lequel George Clooney joue le rôle d’un homme obsédé par le train de vie qu’il mène au gré des Miles cumulés lors de ses voyages, son objectif de vie atteindre les 10 millions de Miles.
Certes, la classe affaires, la classe business voire la classe premium ne représentent que 20 à 30% des sièges disponibles dans un avion, elles réalisent tout de même près de 60 - 70% des recettes de voyage des compagnies aériennes. Selon Ravindra Bhagwanani, en modifiant les politiques d’utilisation des Miles au sein des entreprises, ces dernières pourraient réduire leur budget de voyage aérien de près de 10%, les économies peuvent atteindre 20% selon les entreprises.
Les Miles doivent aujourd’hui faire l’objet d’une réflexion stratégique des entreprises pour lesquelles les déplacements professionnels aériens sont récurrents si elles souhaitent réaliser des économies.